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Le SAF a publié un article sur Médiapart d’une très grande qualité qui résume l’état dans lequel se trouve notre profession et l’image fausse et faussée de l’avocat dont on se méfie, dont on se défie..

A noter, cet article a été rédigé par Jean-Jacques GANDINI (Monsieur le Président), par Florian BORG (Monsieur le Vice- Président) et Estellia ARAEZ (Présidente de notre section bordelaise du SAF).

Extraits de l’article ci-dessous, pour le lire en entier, c’est ici.


Si l’ancienne majorité n’avait de cesse que de critiquer les magistrats, qualifiés par l’ancien président de la République de petits pois, la majorité actuelle semble pour sa part avoir des difficultés à apprécier la réalité de la profession d’avocat, sa fonction dans la société.

Ainsi, les récents projets de loi, adoptés ou non, révèlent un questionnement sur le rôle de l’avocat lorsqu’il ne s’agit pas d’une mise en cause: proposition après l’affaire dite Cahuzac d’interdire à l’avocat, et à lui seul, de cumuler la fonction de parlementaire, action de groupe initiée uniquement par le filtre des associations agréées de consommateurs, élargissement de l’acte d’avocat aux experts comptables dans la loi ALUR, finalement déclaré contraire à la Constitution… Sans oublier le débat sur le secret professionnel et les écoutes téléphoniques qui, selon la Chancellerie, ne doit pas permettre aux avocats de bénéficier d’une impunité qu’ils ne réclament pourtant pas.

La tournure des débats publics et politiques traduit sans doute un malentendu initial, voire une défiance vis-à-vis de l’avocat, qui persiste. La profession se retrouve ainsi sur le devant de la scène médiatique et semble réduite à une caricature de l’avocat : seul l’appât du gain le motiverait, il attiserait les conflits et multiplierait à dessein les procédures, il compliquerait la tâche des enquêteurs et des magistrats, il contribuerait à la remise en liberté des criminels, il se rendrait complice des infractions de ses clients, il creuserait les déficits publics en sollicitant l’augmentation du budget de l’aide juridique…

Tout cela est pourtant très éloigné de la réalité d’une profession dont la fonction est essentielle au fonctionnement d’une société démocratique respectueuse des libertés publiques et attachée à l’égalité des droits. Car il s’agit bien avant tout de la fonction plus que de la profession que nous souhaitons ici défendre :

Celle de l’avocat garantissant les droits de la défense, c’est-à-dire l’égalité des armes dans le procès sans laquelle il n’existe pas de justice. Celle de l’avocat qui intervient en droit de la famille, de la consommation, du logement et de la construction, en droit du travail, en droit des étrangers… Cette justice du quotidien à laquelle il contribue en permettant à ceux qui n’en ont pas la compétence de se défendre ou de faire valoir leurs droits dans une société où l’on constate une inflation de règles de plus en plus complexes. Celle de l’avocat qui, avant tout contentieux et souvent pour l’éviter, est en mesure d’assurer un règlement amiable des conflits et de conseiller son client dans ses démarches juridiques. Car l’objet des conseils donnés par l’avocat n’est pas de contourner la loi au profit de son client mais bien de l’informer de ses droits et de ses obligations afin d’en faciliter l’application dans le cadre de notre Etat de droit.

Cette fonction essentielle que nous souhaitons valoriser doit être accessible à l’ensemble des justiciables lorsqu’ils en expriment le besoin. Nous constatons trop souvent que des pans entiers du droit, en défense comme en conseil, sont encore inaccessibles, notamment aux plus précaires. Pour cette raison, la résolution du problème du sous financement de l’aide juridique est impérieuse non pour les avocats qui n’en vivent pas, contrairement à ce que laissent entendre certains, mais dans l’intérêt des justiciables les plus fragilisés dans un contexte de crise économique.

Pour cette raison également, nous ne défendons pas un monopole de corporation qui aurait pour conséquence d’éloigner encore plus nos concitoyens du droit et des avocats.

Nous sommes persuadés que cet accès élargi au droit implique un travail en commun avec les associations de consommateurs, de locataires, de défense des plus démunis ou avec les syndicats de travailleurs, qui savent eux aussi aider leurs adhérents à se repérer dans le système judiciaire et protéger leurs droits.

Toutefois, la pratique du droit est périlleuse et exercer ces missions ne peut se faire sans garantir la sécurité juridique de cette prestation. La formation, la déontologie, la responsabilité civile professionnelle de l’avocat restent en cela des garanties incontournables d’une prestation de qualité. Dès lors, le pouvoir politique devrait rester prudent lorsqu’il élargit les possibilités d’exercer le droit à d’autres professions.

Accès aux droits et à la justice de qualité pour tous, voilà la réponse que nous souhaitons apporter dans ce débat où l’avocat est suspecté de pratiques contestables.

Dans ce climat de suspicion, les avocats et leurs représentants ne sont pas exempts de tout reproche et ne doivent pas oublier qu’ils en portent aussi la responsabilité par leurs prises de positions.

Comment demander aujourd’hui le respect du périmètre du droit et du rôle de l’avocat quand une partie de la profession court après le mythe d’un grand marché du droit où l’avocat serait tour à tour agent sportif, mandataire immobilier et juriste d’entreprise, privé de fait d’indépendance ? A force de vouloir élargir le périmètre d’intervention de l’avocat, on finit par fragiliser la profession.

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